mardi 29 juin 2010

Bento

Ça fait presque deux mois que j'ai découvert (pour de vrai) les boîtes bento.
Comme c'est très mimi, j'ai eu vite l'envie de faire la cuisine le soir pour manger des bonnes choses le midi.
Au début, j'en avais une grosse et c'était sympa car je pouvais faire des petits compartiments avec plein de petits desserts différents (flans, fruits...), mais maintenant j'en ai une plus petite, mais probablement plus adaptée.
Je me propose donc de détailler de temps en temps le contenu de ma bento, pour donner des petites idées de repas.

boite 1 :
1 blanc de dinde
¼ de courgette
1 pruneau
1 tomate séchée
quelques gouttes d'huile d'olive
boite 2 :
salade verte et chou rouge

samedi 26 juin 2010

Première petite fleur

When you're strange

« When you're strange » par Tom DiCILLO, 2009, États-Unis, 1h30

The Doors a été le Groupe de mon adolescence ! Leurs rythmes, ce mélange de blues et rock, sont envoutants, ça donne envie de bouger, de sauter partout, de chanter...
Ce documentaire qui utilise la superbe voix de Johnny Depp est d'une simplicité très plaisante. Sans hystérie, ce documentaire donne un peu plus d'attention au personnage de Morrison, tout en parlant de sa relation avec le groupe et essayant en même temps d'intégrer le groupe dans une certaine époque, celle qui commence avec l'assassinat de JF Kennedy.
Le film commence avec la fin, la fin de Morrison. A partir de maintenant, même si certaines scènes sont « amusantes » grâce aux exercices de provocation de Morrison, un ton lugubre plane...Les choses sont racontées chronologiquement et leur chute est assez rapide, les Doors ayant joués ensemble apparemment un peu plus de 50 mois. Le « facteur » de cette chute, semble être entièrement Jim. Tel un poète damné, il semble ne pas faire face au succès rapide et s'enfonce de plus en plus, de façon auto-destructive.
Même si le documentaire s'attarde plus sur Morrison, il ne donne pas moins d'importance aux autres quand il s'agit de musique. Le groupe n'existe pas forcément grâce à Morrison mais c'est un tout dans lequel chacun apporte sa touche. Par contre, quand il s'agit de « spectacle », il n'y a que Morrison de visible.
Plein de bonne musique et plein de poésie !

Comment je me suis disputé...(ma vie sexuelle)

« Comment je me suis disputé...(ma vie sexuelle) » par Arnaud DESPLECHIN, 1996, France, 2h58

Il y a plusieurs histoires qui s'entrecroisent pour donner une impression de bazar dans la vie de Paul (personnage principal de ce film), alors qu'il semble s'efforcer tellement de vivre selon un scénario créé à l'avance. Paul semble se prendre assez au sérieux et ce côté est renforcé par les textes de la voix-off.
Dans ces histoires, tous les personnages semblent déséquilibrés et parfois mesquins. Finalement, c'est un des personnages les plus effacés au début du film, Esther, que j'ai le plus aimé. Elle est naïve et insouciante, mais ses émotions s'expriment de façon forte et physique. Elle n'a pas comme les autres un second personnage qu'il faut sortir quand on doit se confronter aux autres.

Summer Wars

« Summer Wars » par Mamoru HOSODA, 2009, Japon, 1h54

Ce qui est génial avec ces japonais c'est qu'ils ont compris que les films d'animation peuvent être aussi pour les adultes ! Cela permet une richesse et surtout une grande liberté dans le choix des sujets et leurs interprétations.
C'est à la fois une très bonne (et drôle) histoire de famille et une histoire complètement farfelue qui se passe dans un autre monde, un monde virtuel. J'ai éprouvé une certaine fascination pour ce film, pour son monde virtuel proche du rêve ou des hallucinations, pour la limite fragile entre le jeu et le chaos.
C'est aussi un film très beau, un film plein de couleur et de détails et qui, par moment, assume entièrement un certain côté kitsch des mangas.
Un super film donc qui passe en ce moment au cinéma et que je conseille (avec un peu de prétention) à toute personne...ouverte (au moins un peu) d'esprit !

lundi 21 juin 2010

In the air

« Up in the air » (In the air en français !) par Jason REITMAN, 2009, Etats-Unis, 1h50

Ce film aurait pu en principe être bien. Mais comme « Juno » et « Thank you for smoking » (deux autres films du même réalisateur), il manque quelque chose pour que ça soit bien. Mais faute de ce quelque chose, on se retrouve plutôt devant un film raté, un peu ennuyant.
Le réalisateur a un scénario assez sympathique et intelligent, des personnages assez cools, des bons acteurs...Mais on dirait qu'il suit trop un schéma pour arriver à faire des films « indépendants ». Du coup, les dialogues ne sonnent pas vrais, le rythme est un peu lourd, certaines scènes sont un peu kitsch, mauvais goût (et je crois que ce n'est pas fait exprès).
Rien de mémorable...

Sémi-pro

« Semi-pro » par Kent ALTERMAN, 2008, Etats-Unis, 1h30

Mon homme (oui, oui, c'est sa faute) s'est passionné depuis peu de temps pour les films avec Will Ferrell. Du coup, on les a presque tous vus ce dernier mois. Et j'avoue que c'est toujours des bonnes comédies et que la tête de Ferrell est trop bien pour ce type de rôle : le rôle du gentil niais.

Le Bal des actrices

« Le Bal des actrices » par Maïwenn, 2009, France, 1h45

La réalisatrice utilise dans ce film le même procédé que pour « Pardonnez-moi ». Elle part avec sa caméra pour faire un film (qui pour une nouvelle fois ressemble à un faux-documentaires) sur plusieurs actrices françaises. Maïwenn se donne encore un rôle dans son propre film...celui de réalisatrice.
Par rapport à « Pardonnez-moi », il y a une certaine légèreté dans celui-ci, lié à la dérision et peut-être surtout au côté comédie musicale.
Maïwenn a effectivement un côté très original et surprenant de faire des films, qui peut fonctionner , je pense, avec toute histoire. Il est rigolo aussi de la retrouver toujours dans la peau d'un personnage à la fois maladroit et culotté.

dimanche 20 juin 2010

Sur les sentiers où l'herbe repousse

Knut HAMSUN - « Sur les sentiers où l'herbe repousse », 1949

J'attendais ce livre depuis deux ou trois ans car il était épuisé dans les librairies et pratiquement introuvable dans les bibliothèques ou sur les sites de vente d'occasion.
Je tenais à le lire car en tant qu'admiratrice de l'œuvre de Hamsun, je voulais savoir quelles étaient les justifications et les raisons de son engagement nazi.
Je peux maintenant dire que de ce point de vue, je suis déçue. Hamsun ne se justifie pas vraiment, car il a la conscience tranquille, il ne regrette rien. Sa seule « excuse », qui n'est pas vraiment convaincante, est son patriotisme. Sa passion pour l'idéologie nazie (sans qu'il soit un antisémite) est complexe, mais toujours un peu incompréhensible.
Mais ce livre, écrit sous la forme d'un journal, reste du Hamsun. Le soin qu'il apporte à l'écriture, l'absence de désespoir ou de détails intimes, nous font oublier qu'il s'agit d'un journal. On sent que Hamsun l'écrit pour la postérité et non pas pour lui-même. Il est impressionnant de voir sa lucidité, sa sérénité et son optimisme, sachant qu'il a presque 90 ans et qu'il est enquêté pour
« trahison » et collaboration par la justice norvégienne. D'où va-il puiser tout cette puissance ?

samedi 19 juin 2010

Anna MALAGRIDA

En ce moment, à l'Espace Écureuil de Toulouse il y a une petite exposition photo d'Anna Malagrida.
Bien évidemment, je ne connaissais pas cette artiste, je suis entrée par hasard.
Les photos, assez grand format, nous hypnotisent par leur couleurs sobres, par la composition très épurée et très graphique, par une lumière de fin de journée hivernale.
Au premier étage, il y a quelques photos de « décors », des rues qui n'ont plus des indications, plus de panneaux publicitaires... C'est tellement reposant à regarder, même si en même temps cela me rappelle de « mauvais souvenirs » (l'ambiance désolante des villes communistes) ; mais j'adore leur côté irréel.
En bas, il y a plusieurs « paysages » dont un triptyque très impressionnant et une petite vidéo qui défile sur un mur en brique.

mercredi 16 juin 2010

Les petits ruisseaux

« Les Petits Ruisseaux » par Pascal RABATE, 2009, France, 1h34

Des fois on aime un film et on se sent tout frustré car on ne trouve rien à dire...C'est poétique, drôle, tendre, intelligent etc etc
Des mots qui n'expriment pas toujours beaucoup de choses.
Allez donc le voir, car vous allez ressortir le bonheur dans le cœur !

samedi 12 juin 2010

Sherlock Holmes

« Sherlock Holmes » par Guy RITCHIE, 2009, Etats-Unis, Angleterre, Australie, 2h08

Il me tardait un peu de voir ce film car je suis une grande fan de Robert Downey Jr. Et effectivement, c'est lui l'atout de ce film. L'histoire passe assez bien car elle est très classique sans trop de rajouts inutiles, le cadre est assez joli (des vieux immeuble dans une Londres d'un autre siècle), mais il manque quelque chose. Peut-être un méchant plus convainquant ou des scènes un peu plus surprenantes. Car il faut le dire : aucune scène qui coupe le souffle, aucune surprise au niveau de l'intrigue.
Tout le temps, on sent la mauvaise touche du film à gros moyens et la fin est déjà une ouverture vers le second épisode.
Pour un film d'aventure/action, je ne l'ai pas trouvé assez accrochant, mais ça reste quand même un (bon ?) divertissement.

Extérieur, nuit

« Extérieur, nuit » par Jacques BRAL, 1979, France, 1h52

Prix Perspectives du Cinéma Français, Cannes 1980
Léopard de Bronze, Festival de Locarno de 1980
Le titre de ce film nous a attiré l'œil dans la revue du cinéma Utopia car on a pensé à Gipi...
Et on a bien fait d'aller le voir car c'est une petite perle.
Très beau, filmé pratiquement que de nuit, avec un bon grain de l'époque, ce film est une simple histoire sur trois « jeunes » un peu perdus, un peu paumés, un peu fragiles, banals et excentriques à la fois. C'est une histoire de vie quotidienne, une histoire sur les rencontres, l'amitié, les errances...
Ce qui est un peu bizarre est que ce film est drôle et en même temps un peu mélancolique et tendre. Il m'est difficile de le caractériser car je suis sortie avec une impression d'avoir suivi une séquence de vie passagère...Et cela inclut beaucoup d'attributs, beaucoup d'éléments qui sont plus reliés aux sensations qu'aux mots.

( Pour lire un vrai commentaire sur ce film, vous pouvez aller sur anteklectimse.blogspot.com/2010/06/exterieur-nuit-exterieur-nuit.html )

Boulevard de la Mort

« Death Proof » (Boulevard de la Mort) par Quentin TARANTINO, 2007, Etats-Unis, 1h50

C'est du Tarantino, mais beaucoup moins bon qu'un Pulp Fiction ou qu'un Inglorious Basterds (mes préférés).
En fait, quand on pense au scénario, c'est limite débile et très minimaliste. Mais avec Tarantino, un tel scénario passe très bien car il a son propre style et son bon rythme. Du coup, on accroche au film dès la première scène et même s'il n'y a pas beaucoup de choses qui se passent, on ne s'ennuie pas.
C'est pourtant pas un film que je vais pouvoir revoir.

Pardonnez-moi

« Pardonnez-moi » par Maïwenn, 2006, France, 1h26

Ce film est très surprenant.
C'est un film dans un film, mais les deux films finissent par se confondre.
L'histoire est très intimiste et on ne sait jamais quelle est la limite entre la fiction et le réel. Du coup, on a l'impression de voir un mi-film, mi-faux-documentaire qui rendent l'histoire encore plus touchante et dérangeante, le sujet n'étant pas si facile à supporter.
La réalisation est assez intéressante et originale : des bouts de film de Violette (personnage principal) enfant, Violette qui filme sa famille, Violette qui est filmée avec sa famille par une copine ou de l'extérieur. On se focalise tout le temps sur Violette, même si des fois elle n'apparaît même pas dans la scène. Le côté « vrai » du film est donc très réussi, même si ce n'est pas ça qui compte finalement : savoir quelle est la part de vérité dans ce film n'apporte rien au spectateur. Il va falloir maintenant louer "Le Bal des actrices" !

mardi 8 juin 2010

Acrylique et huile à l'eau sur toile

Mélange acrylique et huile à l'eau.
Le travail est fait d'après une photo positionnée à l'envers ainsi que la toile. Peinture faite donc à l'envers.

La mort de Bunny Munro

Nick CAVE - "La mort de Bunny Munro", 2009

J'ai eu envie à plusieurs reprises d'arrêter ce livre. Mais j'avais envie de continuer aussi...
Glauque et cru, je me sentais trop spectatrice, trop en dehors de tout ça. Aucune réflexion sur le personnage qui n'est qu'un pauvre alcoolique et dépendent du sexe. D'ailleurs, pendant une grande partie du livre, on a l'impression de lire que ça : la dépravation au plus bas par l'alcool, les viols, la mort, le sexe...Du coup, à un moment donné, ça devient difficile à avaler.
Aucun attachement au personnage de Bunny Munro, même si parfois je me disais que sa relation avec son fils, Bunny Junior, pourrait être touchante. Mais, en fait, ce n'est pas leur relation qui est touchante mais la situation dans laquelle est mis Bunny Junior, qui à son âge n'a aucune échappatoire. Le passage sur le père de Bunny, qui est le portait de ce que Bunny pourrait devenir plus tard, fait presque peur. On se dit que cet état de dépravation et d'auto-destruction doit avoir un certain côté héréditaire! L'envie de dire à Bunny Junior de s'enfuir est encore plus forte.
Vu ses « antécédents » (scénario du magnifique film « The Proposition »), je m'attendais de la part de Nick Cave à un livre noir. Mais je pensais que ce livre sera noir pour donner la déprime et non pas noir pour donner une forme d'écœurement.
J'ai rarement été si partagée sur un livre.

Le complot contre l'Amérique

Philip ROTH - "Le complot contre l'Amérique", 2004

L'histoire du livre est racontée à la première personne, par un enfant au nom de Philip Roth. C'est l'histoire d'une famille juive dans les années 40 et de leur perception de la montée assez rapide et inattendue de l'antisémitisme aux Etats-Unis. Il s'agit bien sûr d'une uchronie, mais tous les personnages politiques sont bien réels, même s'ils sont changés (en partie) dans leurs rôles.
J'ai bien aimé le fait que la tension produite par des événements politiques graves est vue par les yeux d'un enfant qui se base surtout sur les ressentis de son entourage (parents, frère, cousin, tante, copains...). Roth combine très bien une ambiance menaçante (obtenue simplement par la manipulation et la peur) et les histoires de famille, les caractères des personnages (tous très attachants), les petites histoires d'enfance.
La dérive d'un État démocratique paraît à la fois lente et rapide dans le roman de Roth. Les événements semblent s'enchainer lentement dans le récit, car il prend son temps à raconter les choses dans le détail, mais à la fin, on se rend compte que tout est arrivé dans une période de deux ou trois ans et que l'hystérie générale et la peur peuvent arriver du jour au lendemain, à condition bien sûr que le terrain soit bien préparé à l'avance.
Ce roman si bien écrit ouvre aussi plein de questionnements sur l'homme et sa place dans la société, sur l'étranger, sur la peur et la haine, sur les limites de l'Etat et la justesse de certaines lois, sur les « complots » rocambolesques qu'on peut faire avaler à une population effrayée … etc etc.

Le Maître du haut château

Philip K. DICK - "Le Maître du haut château", 1962

C'était le mois des uchronies. L'histoire se base aux Etats-Unis, mais non pas ceux qu'on connait aujourd'hui puisqu'ils ont perdu la seconde guerre mondiale. Plusieurs personnages de tous les camps évoluent dans ce monde, leurs histoires ayant plus ou moins des liens.
L'histoire, une manipulation de la réalité, est très bien et puis tout est fait pour surprendre, mais il est vrai que de point de vue littéraire j'ai moyennement accroché. Par contre, j'ai l'impression de déjà apercevoir dans ce roman un certain mysticisme, qui va s'affirmer beaucoup plus chez K Dick dans les années à venir.

Collages

Jacques PREVERT - "Collages"

Ce livre n'a pas vraiment sa place dans cette rubrique, mais je tenais beaucoup à le mentionner rapidement, car ça a été un bonheur de le découvrir à la médiathèque.
Les collages de Prévert sont impressionnants par leur qualité graphique, mais aussi par le soin et le méticulosité qu'il semblait apporter.
Des mises en scène surréalistes, ses collages forment un monde qui laisse beaucoup de place à l'interprétation.

Le veau d'or

ILF et PETROV - "Le veau d'or", 1931

Ilf et Pétrov étaient apparemment très populaires dans la Russie soviétique grâce à leurs écrits satiriques. La satire est une des meilleures façons pour dénoncer la folie, le ridicule, les contradictions et surtout l'absurdité d'un régime.
"En Russie soviétique, disait-il en se drapant dans sa couverture, l'hôpital psychiatrique est le seul endroit où puisse vivre un homme normal."

Nous autres

Evguéni ZAMIATINE - "Nous autres", 1921

« Nous autres » a été une des premières sources d'inspiration d'Orwell pour son « 1984 ». Zamiatine est l'auteur qui a compris la menace totalitaire dès son commencement, en démarrant ce livre en 1920. Il pousse la construction de ce système politique jusqu'à l'absurde, en créant une dystopie effrayante. Ce monde nous est dévoilé, petit à petit, par l'intermède d'un individu bien intégré (ingénieur et constructeur reconnu), mais à la fois inadapté ou « malade ». Le bonheur par la force ne lui convient plus, mais cela n'est pas réfléchi. Il s'agit d'un mal-être ressenti, mais indicible.
J'essaie de m'arrêter là et de ne pas trop en dire sur le déroulement de l'histoire car c'est un livre qu'il faut absolument lire.
Ce Zamiatine a été surement un clairvoyant, un prophète !
« Je me rendis compte alors, par expérience personnelle, que le rire est la plus terrible des armes, on peut tout tuer par le rire, même le meurtre » (p.196, Ed Gallimard).

Les années 20 : Réflexions d'un étudiant

Varlam CHALAMOV - "Les années 20 : Réflexions d'un étudiant", 1962

Chalamov se résume tout particulièrement dans ce livre à la littérature et le théâtre des années 20. Il nous parle de divers cercles littéraires, des auteurs de l'époque plus ou moins connus. Sur certains, il s'attarde un peu plus sur leur personnalité, comme dans le cas de Maïakovski. En tout cas, on a envie de lire son livre avec un crayon à la main pour noter tous ces noms.
Certaines situations nous font rigoler (celle de l'association « A bas la pudeur » et du communiqué du gouvernement ou celle du journaliste qui arrive à écrire une grossièreté dans son journal, même si sa peine n'a pas été si drôle, ainsi que du correcteur qui, lui, échappe de justesse...).
Par contre, la façon d'écrire de Chalamov sur toutes les « disparitions » ou arrestations est bizarre. Il le rappelle pratiquement chaque fois de manière rapide. On dirait que cela est un fait insignifiant ou plutôt un fait devenu trop banal pour s'en étonner.
Pour moi, ce livre, d'un certain point de vue, a été une révélation : j'ai toujours vu dans la révolution d'Octobre seulement le démarrage d'un régime de terreur. Par ce livre, j'ai l'impression que j'ai réalisé pour la première fois qu'il s'agit bien d'une vraie révolution : les codes sont reniés, ainsi que tout ce que ou qui peut être lié au passé. Je voyais l'influence de la révolution sur ce secteur là, celui de la vie artistique, comme une destruction du "vrai" art. Mais certains artistes semblent avoir trouvé leur part de bonheur dans ce changement radical.

La Faculté de l'Inutile

Iouri DOMBROVSKI - "La Faculté de l'Inutile", 1979

Dombrovski a travaillé sur ce roman pendant une dizaine d'années, en sachant qu'il n'arriverait pas à le publier dans son pays. Alors, il ne prend plus de gants pour dénoncer le régime stalinien dont lui-même a été victime pendant de longues années.
C'est un livre contradictoire. D'un côté, plein de discours sur l'humain et sur le pardon, avec un passage sur la Passion du Christ très marquant... De l'autre côté, le ridicule et l'absurde. Le détail des situations fonctionne très bien surtout parce que l'auteur arrive à mettre si bien en évidence l'absurdité du contexte, de tout un monde. Ce qui effraye est que cet absurde n'est pas abstrait, philosophique, mais présent, concret ; il provient directement de l'absurde des histoires racontées, histoires « vraies » vécues pendant des dizaines d'années par des millions de personnes. C'est un monde où le bon sens a complètement disparu, un monde de désorientation complète pour chaque individu.

Le singe vient réclamer son crâne

Iouri DOMBROVSKI - "Le singe vient réclamer son crâne", roman commencé en 1943

Ce livre parle de façon directe du nazisme comme régime assassin. On retrouve plein de détails connus historiquement, mais par moment certaines choses nous semblent étranges car elles ne nous disent pas grande chose...Nous nous trouvons donc dans un contexte inventé à moitié (ou un peu moins), mais d'une cruauté affligeante. Mais, on a du mal à se laisser tromper si on connait quelques données sur l'auteur de ce livre : écrivain russe qui a directement subi à plusieurs reprises l'oppression et l'injustice du régime stalinien ! Parler du nazisme n'est qu'un prétexte pour dénoncer ces types de régimes tortionnaires et inhumains. Oui, Dombovski devient un « donneur de leçons », mais dans son roman, comme dans la réalité, les individus se font vaincre, les résistants finissent par se faire coincer.
« O gens qui remplissez les prétoires, ce qui est en train de se produire, ce n'est pas simplement un innocent qu'on condamne, ni un gouvernement qui règle son compte à un journaliste indocile, ce n'est pas seulement l'assassinat de votre liberté, c'est bien pire encore : c'est un crime contre votre personne, c'est la hache qui, demain, s'abattra sur votre tête, c'est le revolver que des tueurs mettent entre les mains de votre enfant. O, si la lecture de ce livre pouvait vous inciter à méditer ce qui se passe sous vos yeux ! O, si seulement vous pouviez y réfléchir ! »(p. 421)

Cel mai iubit dintre pamanteni

Marin PREDA - "Cel mai iubit dintre pamanteni" (Le Plus aimé des terriens), 1980

Comment j'ai pu rater ce livre pendant toute mon adolescence ?
En tout cas, j'ai été vraiment étonnée de la critique si directe, de la dénonciation si extrême que Marin Preda fait du régime communiste roumain : arrestations et tortures abusives, mise en place de façon brusque d'un système oppressif, destruction de la culture et de son élite, instauration du faux dans les relations humaines et dans le quotidien de chacun...
Oui, je n'arrivais pas à croire que ce livre n'a pas rencontré la censure, qu'il ne dénonce pas les faits de façon voilée et « devinée ». Je me demandais à quel point l'auteur avait réussi à intégrer le système pour se « permettre » une telle chose. Tout cela a été peut-être possible car il s'agit de la période stalinienne ? C'est pourtant naïf de croire que tout ça est propre à cette période. J'ai même eu peur à un moment donné que l'auteur va finir par dériver vers une adoption totale et aimable de la doctrine communiste....Mais sa mort « bizarre » un mois après la sortie du livre met fin à toutes ses questions. Tromper le système se paie.
Mais ce livre est plein aussi d'histoires d'amour tordues et déprimantes, de questions existentialistes (puisque le personnage principal est prof en philo, philo qui cesse d'exister car remplacée par le marxisme), d'histoires de familles...L'homme continue à se poser les mêmes questions, à souffrir des mêmes choses « humaines » et vaines même sous une dictature ? La dictature ne semble pas anéantir complètement les individus, il y en a qui arrive à s'en échapper...

Le Don

Vladimir NABOKOV - "Le Don", 1938

Décidément Nabokov est une de mes grandes découvertes de l'année 2009 !
J'ai adoré ce roman, lourd à lire, difficile à suivre, mais d'un génie qui te donne la sensation de flotter de bonheur. Car on lit ce livre avec une joie continue même quand les passages du livre sont moins drôles.
C'est merveilleux comme roman car Nabokov nous balade à travers des styles différents, en partant de la poésie et du récit de voyage, pour passer par l'humour et l'ironie et arriver à des réflexions intelligentes.
Des cinq chapitres, j'ai plus qu'adoré celui dédié à la biographie fictive de Nikolaï Tchernychevski. Plein d'humour, Nabokov est très fort dans la dérision et un maître de la satire !

Roman avec cocaïne

M. AGUEEV - "Roman avec cocaïne", 1934 ?

Le manuscrit de ce roman a été envoyé dans les années '30 à une revue parisienne pour publication. Son auteur reste inconnu.
Le livre ressemble bien à un premier roman, un roman de début, un livre de jeunesse, mais en aucun cas à un roman de débutant. S'il s'agit d'un pseudonyme et que l'auteur ait continué à écrire sous un autre nom, tant mieux !
Le premier chapitre nous fait penser a un roman initiatique, mais il se termine sur la décadence. Les sentiments du jeune Ivan (personnage principal du livre) sont contradictoires : de la honte et de la peine pour sa mère, du désir et de l'indifférence envers les femmes, de l'amour et du rejet physique.
Mais, le chapitre le plus fort est celui dédié à la cocaïne, drogue contradictoire autant que les émotions d'Ivan...
Les sensations sont tellement fortes, les descriptions tellement détaillées qu'on sent presque l'effet destructeur de cette drogue sans en avoir jamais pris. C'est un roman noir et dépressif du début à la fin.

Je tremble, ô matador

Pedro LEMEBEL - "Je tremble, ô matador", 2004

Petite histoire d'amour platonique entre un travesti et un révolutionnaire sous la dictature de Pinochet. Si les personnages principaux ne me disaient pas grande chose, j'ai adoré les passage sur Pinochet...une présence sentie que par l'intermédiaire des monologues de sa femme.

La Méprise

Vladimir NABOKOV - "La Méprise", 1936

J'avais commencé à écrire mes quelques lignes sur ce livre, mais Nabokov le fait beaucoup trop bien dans sa préface. C'est un paragraphe que j'ai relu plein de fois et qui a fait son effet à chaque fois (j'adore !) :
« "La méprise", dans un esprit de parenté absolu avec le reste de mes livres, n'a aucun commentaire social à faire, ni aucun message à accrocher entre ses dents. Ce livre n'exalte pas l'organe spirituel de l'homme et n'indique pas à l'humanité quelle est la porte de sortie. Il contient bien moins d' « idées » que tous ces plantureux et vulgaires romans que l'on acclame si hystériquement dans la petite allée des rumeurs entre les balivernes et les huées. L'objet aux contours attractifs ou bien le rêve d'un Wienerschnitzel que le freudien pressé croit pouvoir débusquer dans mes rebuts lointains, vont se révéler, après un examen plus approfondi, un mirage ridicule organisé par mes agents »
Et plus tard dans le chapitre IX....
« En imagination, je vois un monde neuf où tous les hommes se ressembleront comme se ressemblaient Hermann et Félix ; un monde de Hélix et de Fermann, un monde où l'ouvrier tombé mort devant son établi sera aussitôt remplacé par son double parfait, souriant le sourire serein du parfait socialisme. C'est pourquoi je pense que la jeunesse soviétique d'aujourd'hui tirerait un profit considérable d'une étude de mon livre, sous la surveillance d'un marxiste expérimenté qui aiderait les jeunes gens à suivre à travers ses pages les méandres rudimentaires du message social qu'il contient. Mais oui, et que d'autres nations, elles aussi, le traduisent dans leurs langages respectifs, de sorte que les Américains puissent satisfaire leur besoin de magie sanglante ; les Français discerner des mirages de sodomie dans ma prédilection pour un vagabond ; et les Allemands savourer le côté ombrageux d'une âme à demi slave. Lisez, lisez-le, aussi nombreux que possible, mesdames et messieurs ! Je vous accueille tous mes lecteurs. »

Les Sept pendus

Léonid ANDREIEV - "Les Sept pendus", 1908

Livre puissant qui traite de l'injustice par la description de quelques jours d'avant l'exécution de plusieurs personnes. Le livre commence avec une description de l'état d'âme de la supposée « victime » pour s'ensuivre sur les derniers jours des supposés « bourreaux »...
Écrit de façon froide et succincte, ce livre nous oppresse et nous serre le ventre.

Chicago

Alaa El ASWANY - "Chicago", 2006

J'étais eu peu déconcentrée par ce livre car je ne connais rien à l'Égypte. Comment ce livre sur le bigotisme religieux, la tyrannie, la peur, le conformisme, l'isolement, la violence et la torture d'État...a pu dépasser la censure ?
Plusieurs égyptiens se retrouvent à Chicago pour des études en tant que doctorants ou professeurs. Pour certains, il s'agit d'un départ temporel pour d'autre d'un exil définitif. Ils ne forment pourtant pas une communauté égyptienne, ce sont des individus dont leurs histoires s'entrecroisent rarement. Toutes ces histoires sont racontées simplement avec du suspense à la fin de chaque chapitre, mais un certain tragisme prédomine. Sortis de leur contexte habituel, ils se retrouvent livrés à eux mêmes. Certains sont tellement imprégnés par l'éducation reçue que la combinaison des deux mondes n'est pas possible. L'étouffement et les regrets finissent par ressortir provoquant des vrais drames individuels.
Ce livre est aussi une critique de la dictature et de la répression, ainsi que du soutien accordé par les grandes puissances aux tyrannies. L'image est sombre et sans beaucoup d'espoir surtout quand « le monde libre » finit par appliquer les mêmes méthodes répressives (mais bien voilées) qu'une dictature.

Dressez haut la poutre maîtresse, charpentiers

Jerome David SALINGER - "Dressez haut la poutre maîtresse, charpentiers", 1955

Plusieurs fois ces dernières années, je me suis dit qu'il état bien dommage que Salinger ait écrit si peu. Je ne connaissais pas ce petit roman...
Le livre commence avec une courte présentation des enfants de la famille Glass pour enchainer ensuite sur un seul après midi étouffant de l'été de 1942. Tout se passe dans un espace physique restreint (une voiture et ensuite un petit appartement) et la conversation entre les personnages est à la fois comique et embarrassante.
L'histoire est certainement très bien, mais je me demande si ce n'est pas la façon d'écrire de Salinger qui m'attire autant. Toute histoire racontée par Salinger (avec ses divagations, ses personnages si attachants et humains) devient très vite un moment de pur bonheur !

L'Homme est un grand faisan sur terre

Herta MULLER - "L'Homme est un grand faisan sur terre", 1986

Il est étrange ce livre, très poétique et à la fois très cru. Les deux caractéristiques sont bien appuyées par l'écriture : des phrases courtes dans des courts chapitres. L'auteur arrive à rendre l'histoire du livre très claire alors que tout semble décousu, le livre étant un enchainement de gestes, d'attitudes, de fragments de dialogues...Le poids du temps, de l'attente (d'un passeport afin de pouvoir émigrer) est très bien rendu : l'atmosphère est pesante et dérangeante, le petit monde est malsain et corrompu.

La Route

Cormac McCARTHY - "La Route", 2006

L'histoire peut paraître monotone, car il s'agit d'un livre d'ambiance dans lequel on n'explique pas, on ne donne pas de noms...
La route semble interminable dans un monde sans plus aucune attente. La survie est un combat, une peine tandis que la mort est la seule échappatoire. Les choix sont pourtant instinctifs et une foi sans dieux semble être bien imprégnée dans le quotidien.

Le Faiseur d'histoire

Stephen FRY - "Le Faiseur d'histoire", 1996

Encore un bon choix éditorial des « Moutons électriques » !
Cette uchronie nous donne une autre vision du monde si Hitler n'était pas né. Le Mal n'est pas l'action d'une seule personne, mais d'un système bien ficelé. Il est la conséquence d'un certain contexte idéologique et économique. Diaboliser l'homme est un choix facile afin de nier la banalisation de la violence au niveau d'un système politique.
Mais, un tel sujet est très bien introduit par Fry dans une fiction distrayante et facile à lire. Dire des choses importantes n'est pas forcément réservé aux tons sérieux et cela ne change en rien la nature du sujet.

lundi 7 juin 2010

Coeur de lièvre

John UPDIKE - "Coeur de lièvre", 1960

Rabbit, surnom du personnage principal, semble avoir grandi trop vite. Il étouffe et il finit par fuir, revenir, fuir...Personnage narcissique et égoïste, Rabbit est aussi quelqu'un qui fuit le quotidien, qui arrive rarement à trouver sa place. Il s'attache facilement aux autres, mais quitte aussi facilement. Dans la vie, il n'y a pas qu'un seul bon chemin, Rabbit sait donc qu'il a le choix, mais cela ne lui rend pas la vie plus simple.
Mais, pour moi, le personnage attachant du livre n'est pas du tout Rabbit (de plus, je n'en suis pas sûre que c'était le but de l'auteur), mais Jack Eccles, religieux qui essaie de sauver le « vilain » Rabbit, en l'accompagnant dans son retour.

Les voix de l'asphalte

Phlip K. DICK - "Les voix de l'asphalte", 1952-1953, paru qu'en 2007

Stuart Hadley, personnage principal de ce livre, est dans un état continu d'insatisfaction, de questionnement et de malaise. Beau gosse, père et mari d'une belle jeune femme, Stuart n'a pas de réponse à ses besoins d'autant plus que les questions sont complètement floues dans sa tête. Attiré par le fanatisme religieux et ses prédictions apocalyptiques (renforcées par le contexte historique de la guerre de Corée et de la bombe A), Stuart sombre dans la folie provisoire et la violence afin de retrouver les réponses ou afin de perdre l'envie.
J'aime bien ce livre grâce au thèmes abordés, mais aussi à sa construction : un long démarrage caractérisé par des descriptions réalistes, une pression montante, une fin ambiguë sur les choix du personnage. Les propos des personnages sur la guerre comme devoir, les Noirs, les Juifs, la religion, exprimés tout naturellement lors des conversations banales anéantissent à plusieurs reprises l'atmosphère paisible du livre.

La conjuration des imbéciles

John Kennedy TOOLE - "La conjuration des imbéciles", 1980

J'ai acheté ce livre grâce à la petite histoire concernant l'auteur : il s'est suicidé avant la publication de son livre car il n'arrivait justement pas à le publier !
J'ai tenté, mais je n'en suis pas sortie déçue ! Une vraie pièce de théâtre, surréaliste en plus, sur plus de 500 pages ! Les situations et les personnages sont complètement loufoques et décalés, les dialogues sont écrits dans un mauvais anglais ou de façon « élevée » surtout quand il s'agit du personnage principal, Ignatius (eh oui, même les prénoms sont bien choisis !).
Et pour bien finir et résumer un peu l'esprit du roman, je vais reprendre la citation de Swift qui se trouve tout en début du livre : « Quand un vrai génie apparaît en ce bas monde, on le peut reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui ».