jeudi 20 mai 2010

Peinture à Madrid

Depuis la semaine passée à Madrid en avril, je voulais faire un petit texte sur les musées de peinture de Madrid et plus précisément sur les « coups de cœurs ». Beaucoup d’hésitations car les notes prises sur place sont souvent des impressions et en les relisant, je me rends compte de la faiblesse de mon vocabulaire dans le domaine de la peinture et de la répétition des phrases.
Pourtant, un point commun à tous mes « coups de cœur » : une certaine lumière un peu surréaliste, et la plupart du temps un coup de pinceau plutôt dans la gestuelle que dans la méticulosité .
Il s’agit de certains peintres que je ne connaissais pas du tout, d’autres que je connaissais de nom et encore d’autres que je pensais connaître. « Penser connaitre » un peintre en feuilletant un album de peinture me semble maintenant dérisoire car aucune reproduction ne vaut l’original. Voir les toiles en vrai est la « vraie » découverte d’un peintre. L’impact est incommensurable, non seulement par la taille, mais surtout par les couleurs, la luminosité, la matière, le trait…
La présentation sera faite selon l’ordre de ma découverte. Et puis, il s’agit seulement d’un aperçu car nombreux sont ceux qui ne vont pas apparaitre (car Internet est limité) : Jean-Baptiste Corot, Edgar Degas, Diego Velasquez, Jérôme Bosch, Vicente Palmaroli, Bartolomé Carducho, José Hernandez Munoz, Fernando Labrada, Vincent Van Gogh, William Turner (expo temporelle), Mark Rothko, Claude Monet, Arthur G. Dove, Michael Andrews (”Portrait of Timothy Behrens”-très beau !), Giovanni Battista Piazzetta, Anton Van Dyck, Paolo Uccello…


Edward HOPPER - "Hotel Room", 1931, Musée Thyssen

Je connaissais bien quelques peintures de Hopper et je n'aimais pas beaucoup car je le trouvais, je crois, trop minimaliste...Maintenant j'aime !
Pas de détails, les visages n'ont presque pas de traits, mais le contraste des couleurs et la façon de gérer la lumière (je vais en parler souvent de ça) nous envoient tellement dans un autre monde...
Cette impression est due aussi au côté mélancolique et absent des personnages de Hopper. Avec des cadres simples et des personnages perdus dans leurs pensées, il crée des super ambiances !



Edward HOPPER - "Girl at a Sewing Machine", 1921-22, Musée Thyssen



Maurice DE VLAMINCK, « Fields » 1906-1907, Musée Thyssen

J'ai beaucoup aimé cette peinture, mais en cherchant d'autres sur Internet du même peintre, j'ai moins accroché (à quelques exceptions).
J'ai adoré son trait grossier, ses couleurs...



Lyonnel FEININGER - "The white man", 1907, Musée Thyssen

Plus qu'un coup de coeur. Je suis revenue trois jours plus tard pour revoir cette peinture, qu'on a aussi acheté en poster pour chez nous !
Les personnages (surtout celui de derrière), nous faisaient penser à du Breccia, mais traité peut-être de façon plus graphique.
En cherchant un livre de Feininger, nous nous sommes rendus compte que cette période qu'on adore de lui n'a pas duré longtemps car il est passé à quelque chose de beaucoup plus lâché et expérimental.



Theodore ROBINSON - "Capri", 1890, Musée Thyssen



José GUTIERREZ SOLANA, Musée de la Reine Sofia

Je ne pouvais pas ne pas aimer Solana car c'est noir et difforme.



José GUTIERREZ SOLANA - "La Tertulia del Café Pombo", 1920, Musée de la Reine Sofia



José GUTIERREZ SOLANA - "La Procesion de la Muerte", 1930, Musée de la Reine Sofia



Adriano DEL VALLE, Musée Reine Sofia

Et un peu de collages...



Josep RENAU (1907-1982), Musée Reine Sofia

Et un peu de "propagande"...



Miquel BARCELO, expo au Centre Caixa Catalunya

J'ai bien aimé ses croquis faits en Afrique et certaines sculptures. Par contre, certaines peintures (avec beaucoup de matières), je les ai trouvé ignobles.



Salvador DALI, Musée Reine Sofia

Malheureusement, je n'ai pas noté les noms de ces trois peintures qui datent d'avant sa "vraie" période surréaliste.
Dali avait déjà une interprétation surréaliste, irréelle ; la lumière est hypnotisante.



Pieter BRUEGHEL, "The Triumph of Death", 1562-1563, Musée Prado

Dans la même salle avec les Bosch et dans le même esprit.
Observer tous les détails macabres et cauchemardesques de la peinture peut prendre bien longtemps.
J'aime beaucoup sa gamme des couleurs.



EL GRECO - "Fable", 1570-1575, Musée Prado

El Greco était très en avant sur son temps. J'ai du mal à croire qu'il date du XVI-ème siècle.
A Madrid, il y a beaucoup de peinture de lui à caractère religieux. Les premières minutes j'ai été sceptique, car les couleurs sont "sales", noires, les corps plein d'erreurs anatomiques, souvent trop allongés ou difformes. Par rapport aux peintures de l'époque, les siennes sautent trop aux yeux. Il n'est pas dans la recherche du détail, mais semble surtout attaché aux expressions.
Je me demandais comment El Gréco était perçu par ses contemporains car ses peintures manquent de brillance, de satin et de dentelle.



EL GRECO (1541?-1614) - "Cristo con la cruz", Musée Prado



Georges DE LA TOUR - "Saint Jerome reading a letter", 1616-1620, Musée Prado

Quelle finesse dans la réalisation !



José DE RIBERA - "La Mujer barbuda", 1631, Musée Prado

Grande découverte ! Très noir et très expressif, presque fou. Ribera est un maître. Dans cette même série, il faut rajouter (à côté de La Mujer Barbuda et El Tacto) "Arquimedes" (1630), que je n'a pas réussi à trouver.
On reste bloqué devant ses peintures...tellement bloquée, que je n'ai rien noté dans mon carnet.


José DE RIBERA - "El Tacto", 1632, Musée Prado



John SINGER SARGENT - "The Dauthers of Edward Darley Boit", 1882, expo temporelle, Musée Prado

Cette peinture est magnifique. Elle a la taille d'un mur et en vrai elle est tout simplement superbe !



Joaquin SOROLLA - "Madre", 1895, Musée Soralla

Sorolla est Le Maître de la Lumière. Ses peintures respirent le soleil. Toutes sont magnifiques.
Ses cadrages sont très osés. Il se "permet" de peindre un dos d'enfant, de couper les oreilles d'un cheval ou les bords d'un chapeau. Cela donne une impression d'instant qu'on retrouve souvent avec la photo.
J'ai par contre beaucoup moins aimé les peintures de son jardin...

Joaquin SOROLLA - "La bata rosa", 1916, Musée Soralla


Joaquin SOROLLA - "Aun dicen que el pescado es caro !", Musée Prado


Joaquin SOROLLA - quelques esquisses, Musée Soralla



Francisco DE GOYA - "Perro Semihundido", 1819-1823, Musée Prado

Au Museo del Prado, il y a une salle entière dédiée aux "peintures noires" (1819/1823) de Goya. Je n'aime pas particulièrement les autres peintures de Goya (celles de la famille royale ou celles montrant des scènes de vie), mais les peintures faites à la fin de sa vie, je les adore tout simplement.
Il y a quelques toiles qui sont impressionnantes par leur taille, on dirait des fresques de folie, d'autres (comme celle-ci) sont très graphiques.
En les regardant de près, elles ont toutes des textures magnifiques et un trait très moderne. J'ai été aussi impressionnée par la mise en page très avant-gardiste (ce que j'ai nommé plus haut de graphique ). Souvent on retrouve des foules, des gens qui semblent être un sur l'autre, mais ils ne sont jamais centrés, ils n'occupent jamais la toile entière. La nuit est omniprésente, mais pas le manque d'éclairage, tout cela donnant une ambiance apocalyptique et malsaine. Goya est proche de l'expressionnisme, les visages étant toujours déformés par la peur, la violence ou tout simplement par la vieillesse.
Belle esthétique du laid.

Francisco DE GOYA - "Peregrinacion a la fuente de San Isidro", 1819-1823, Musée Prado


Francisco DE GOYA - "Dos viejos comiendo", 1819-1823, Musée Prado



Raimundo de MADRAZO (1841-1920) - " La modelo Aline Masson", Musée Prado


Raimundo de MADRAZO (1841-1920) - " La actriz Maria Guerrero como "Dona nes"", Musée Prado



Emilio SALA (1850-1910) - "Maria Guerrero, nina", Musée Prado



Ignacio PINAZO - "Ultimos momentos del rey don Jaime I El Conquistador", 1881, Musée Prado

Mauvaise reproduction...



José Moreno CARBONERO - "El Principe don Carlos de Viana", 1881, Musée Prado

Cette peinture doit faire au moins 2m sur 3. Le trait du pinceau est assez lâché, mais quand on réduit, cela semble très méticuleux et parfait. Il s'agit d'une pure interprétation optique.
C'est une peinture que j'ai ADORE en vrai, mais en la voyant par la suite dans un livre, j'ai réalisé à quel point il est important de voir les peintures et non seulement leurs reproductions : dans le livre elle m'attirait à peine l'œil alors qu'en vrai j'avais du mal à la quitter.
J'adore la lumière, le traitement, les couleurs, le visage désabusé du "prince" (qui manque de sa splendeur habituelle).



José Moreno CARBONERO - "Conversion del duque de Gandia", Musée Prado



Mariano FORTUNY - "Los hjos del pintor en el salon japones, 1874, Musée Prado

Fortuny est un des noms que j'ai bien retenu car il a été une des plus importantes découvertes. Les couleurs sont tellement maitrisées que des fois on a presque l'impression de voir les choses en relief. A un moment donné, je me suis approchée de la peinture car j'étais presque sûre qu'il utilisait le collage...mais je me trompais.


Mariano FORTUNY - "Marroquies, Musée Prado


Mariano FORTUNY - "Viejo desnudo al sol, 1871, Musée Prado

Pour cette peinture, je ne peux utiliser que des mots comme "sublime", "magnifique" etc...de quoi avoir l'air bête, mais en même temps en admiration sans limites !



Martin RICO (1833-1908)

Je ne suis pas sûre que cette peinture était au Prado, mais elle caractérise bien la peinture de Rico.
C'est classique, mais c'est beau (je ne sais pas pourquoi j'utilise le "mais"...classique et beau ne sont pas en contradiction !)



Alessandro MAGNASCO (1667-1749)

Je n'arrive pas à retrouver les peintures que j'ai vues au Musée de Bellas Artes.
Ses peintures sont très sombres, presque illisibles, incompréhensibles...Mais il arrive seulement avec quelques traits à donner du relief et de la forme.



Manuel Alcorlo BARRERO - "La Patera de los ricos", 1935, Musée des Beaux-Arts



Winslow HOMER - "Beach Scene", 1869, Musée Thyssen



Hans BALDUNG GRIEN (1484/85-1545) - "Portrait of a Woman", Musée Thyssen

Je suis beaucoup moins sensible à la peinture du 16e-17e siècle, mais je crois que la peinture allemande me plait (par rapport à celle hollandaise par exemple, qui a l'air très chargée).
Beaucoup de portraits sur de beaux fonds (verts la plupart du temps), des visages difformes ou angéliques (comme celui-ci).



Antonio Munoz DEGRAIN (1840-1924) - "Chubasco en Granada", musée Prado



Lucian FREUD - "Large interior, Paddington", 1968-1969, Musée Thyssen

Cette peinture de Freud me fait penser à celles que j'ai postées plus haut de Dali. Il me semble retrouver la même lumière surréaliste, un traitement à la fois réaliste et déformé.