dimanche 25 juillet 2010

Les Fusils

William T. VOLLMANN - «Les Fusils», 1994.
Éditions « Le cherche midi », 2006
«Mon but, avec «Sept Rêves», a été de créer une «histoire symbolique»-c'est-à-dire, un récit des origines et métamorphoses, souvent déformé, fondé sur les faits tels que nous les connaissons, mais dont la déformation sert une conception plus profonde de la vérité. C'est là marcher sur une corde raide, avec d'un côté le littéralisme servile et de l'autre la complaisance»

« Les Fusils » est une des sept parties des « Sept Rêves ».
Il y a un mélange constant entre les personnages, entre les époques. On arrive a deviner les choses en faisant attention au langage, aux détails. En finissant le livre, je me suis dit qu'un tel procédé pourrait être très fatiguant à suivre, mais dans ce livre, les états d'esprits des personnages sont tellement proches que cela fonctionne très bien. Le capitaine Franklin, explorateur anglais mort en Antarctique en 1847 se confond si bien avec le Capitaine Subzero, aventurier de l'époque contemporaine !
Mais d'autres mélanges aussi impressionnants sont à mentionner : « Les Fusils » est un des récits les plus poétiques que j'ai lu dernièrement. La blancheur et l'hostilité du paysage donnent aux histoires une puissance particulière. Pourtant, « Les Fusils » est aussi un très bon récit journalistique, les lettres envoyées par Vollmann (lettres reproduites à la fin du livre) aux autorités canadiennes sur la ré-localisation des Inuits dans les années 50, venant renforcer ce côté d'enquête journalistique, ce coté historique.
Les passages sur Reepah, femme-enfant « malade », ceux sur l'isolation totale à -40° degrés (qui fait penser au dernier homme sur terre) ou ceux sur les « ambiances » qui mènent au cannibalisme, sont pour moi très forts, car l'auteur joue avec le rêve et le réel. Ces scènes, je les visualise dans le brouillard, comme des hallucinations.
Et pour finir, il s'agit d'une belle édition, car le texte est entrecoupé par moments par de petits croquis de l'auteur :